Festival de
Toronto 2018 : une moisson de films chinois
par Brigitte
Duzan, 16 septembre 2018
Prenant chaque année le relais de la Biennale de
Venise, le Festival international de cinéma de
Toronto (TIFF) s’est tenu cette année du 6 au 16
septembre. Au programme figuraient pas moins de neuf
films chinois, dans six sections différentes : six
long métrages de fiction, deux courts métrages et le
dernier documentaire de Wang Bing. C’est la moisson
d’automne.
Troisième volet de la trilogie des « Bullets » qu’on
attendait à Venise et qui sort à Toronto, c’est un
film de wuxia façon Jian Wen, où l’on trouve
une certaine influence du style de
Xu Haofeng (徐浩峰),
en reprenant même l’acteur principal de « The
Master » (《师父》),
Liao Fan (廖凡).
- Shadow
《影》
de
Zhang Yimou (张艺谋),
présenté en première mondiale à la Biennale de Venise où le
film a étonné par sa beauté formelle et obtenu le prix
Jaeger-LeCoultre Glory
[1].
Shadow
Avec « Shadow », pseudo-wuxia sur fond d’histoire des Trois
Royaumes,
Zhang Yimou renoue avec la couleur et le chatoiement de
l’image, dans un style qu’il a lui-même annoncé comme étant
celui « d’une aquarelle chinoise ».
Une femme qui a été abandonnée bébé parce qu’elle
avait un trouble génétique tente de sauver une
petite fille menacée du même sort pour la même
raison.
- Legend of the Demon’s Cat
《妖猫传》,
director’s Cut, de
Chen Kaige (陈凯歌)
Nous sommes sous les Tang, un chat démoniaque
possède la femme d’un général et sème la pagaïe dans
la cour impériale en tuant la concubine Yang Guifei
(杨贵妃),
le poète Bai Letian (白乐天)
chargé de la chronique impériale et le moine
japonais Kukai (僧人空海)
allient leurs forces pour trouver les causes des
tous ces étranges phénomènes)
Pema Tseden recevant
son prix à Venise, le 8 septembre 2018 (photo
TibetanReview)
- Jinpa
《撞死了一只羊》de
Pema Tseden (万玛才旦),
couronné de prix du meilleur scénario à la Biennale
de Venise, ce qui est justice. C’est sans doute le
meilleur film de Pema Tseden à ce jour, mais c’est
certainement son scénario le plus complexe, adapté
de deux nouvelles, l’une de lui-même, qui donne son
titre au film, et l’autre de Tsering Norbu (次仁罗布).
- The Crossing
《过春天》, premier long métrage en première mondiale de
la jeune réalisatrice Bai Xue
(白雪), une réalisatrice à découvrir.
Présentation du film par Giovanna Fulvi :
https://www.tiff.net/tiff/the-crossing/
Prix Netpac, mention
spéciale. Commentaires du jury :
“Bai Xue's storytelling in her debut film The
Crossing shattered cinematic boundaries to
create an original visual language that propelled
her protagonist's emotional crossing into adulthood
as she crossed the physical boundaries of Hong Kong
into mainland China.”
- Long Day’s Journey into Night
《地球最后的夜晚》
deuxième film de Bi Gan
(毕赣),
présenté à Cannes en mai.
Fête stylistique inscrite dans un espace spatio-temporel en
noir et blanc, ce nouveau film de Bi Gan est un voyage
nocturne où la passion plane et se dissout comme dans un
rêve.
Court métrage de 16’ en noir et blanc produit sous la
supervision de Béla Tarr, « raw and haunting tale of ruin
and desperation », par un jeune réalisateur qui s’est
suicidé peu de temps plus tard.
Le nouveau
documentaire-choc de Wang Bing, suite de son travail de
mémoire sur la campagne contre les droitiers de 1957, après
« He Fengming » (《和凤鸣》)
et
« Le
Fossé » (《加边沟》).
Huit heures d’entretiens avec les derniers survivants du
camp « de rééducation » dans le désert de Gobi où la plupart
des détenus moururent de faim au moment de la Grande Famine.
Le documentaire sort en France le 24 octobre, sous le titre
« Les âmes mortes ».