Quatre films à
voir au Centre culturel de Chine à Paris en mars et avril
par Brigitte Duzan, 14 mars 2017
Le Centre culturel de Chine à Paris a cette année modifié sa
programmation de cinéma, avec des films choisis en fonction
d’un thème différent chaque mois.
1. Le mois de mars est consacré aux films de wuxia
(武侠片)
- et non de kongfu comme indiqué. Ce n’est pas la
même chose en effet, les films de wuxiaétant adaptés de
la littérature du même nom
[1],
avec une longue histoire et tout un ensemble de codes et de
valeurs hérités d’abord du taoïsme. L’un des grands
représentants au 20ème siècle de cette
littérature est Wang Dulu (王度庐).
Et c’est de Wang Dulu qu’est adapté le premier film qui a
été programmé au début du mois de mars, le célèbre
« Tigre
et dragon » (《卧虎藏龙》)
d’Ang
Lee (李安).
2. Le film programmé le 18 mars,
« The
Master » (《师父》),
est d’autant plus intéressant qu’il a été réalisé
par un cinéaste qui est d’abord écrivain, et auteur
de récits de wuxia modernes, tout en
remontant aux sources les plus anciennes :
Xu Haofeng (徐浩峰).
« The Master » est son troisième film, mais il est
adapté d’une nouvelle tirée du même recueil que
celles dont ont été adaptés les deux premiers.
Contrairement à ceux-ci, c’est une grosse
production. Le scénario est sans doute moins
original que les précédents : c’est l’histoire
d’un
The Master
maître de wingchun qui, en 1932, veut se faire un nom
dans le nord en fondant une école à Tianjin. En revanche, on
peut faire confiance à Xu Haofeng pour avoir
particulièrement soigné les combats, c’est sa spécialité,
fondée sur des recherches très poussées ; le film a
d’ailleurs été primé pour sa chorégraphie des combats au
festival du Golden Horse en novembre 2015.
The Master, trailer
3. Le film suivant, le 25 mars, ne rentre pas à proprement
parler dans le genre du wuxia.
« Mojin
the Lost
Legend » (《鬼吹灯之寻龙诀》)
est en fait un genre adapté de romans diffusés sur internet
qui font fureur en Chine depuis quelques années : les romans
de pilleurs de tombes
[2].
Et ces romans sont tellement populaires qu’ils ont bien sûr
attiré l’intérêt des producteurs et que déjà plusieurs films
ont été adaptés de divers épisodes.
Mojin the Lost Legend
« Mojin the Lost Legend » est adapté d’un bestseller
de l’un des deux auteurs les plus connus de ce genre
de roman : la série « Ghost Blows Out the Light » ou
« Le fantôme souffle la chandelle » (《鬼吹灯》)
de Zhang Muye (张牧野)
ou Tianxia Bachang (天下霸唱).
C’est une grosse production, et le quatrième film
réalisé par un metteur en scène très original,
Wu Ershan (乌尔善),
avec quatre grands acteurs dans les rôles
principaux.
Mojin the Lost Legend, trailer
Changement de thème en avril : on passe au genre du
film policier, genre relativement récent dans
le cinéma chinois, mais également à la mode en ce
moment en Chine.
1. Le premier film du mois, programmé le 1er
avril, « 12
Citizens » (《十二公民》),
est le premier film du jeune réalisateur
Xu Ang (徐昂)
qui a d’abord été metteur en scène de théâtre. C’est
cette expérience qu’il a transposée au cinéma pour
mettre en scène comme un huis clos son
« 12
Citizens »
qui est
un remake du célèbre film de 1957 de Sidney Lumet
avec Henry Fonda : « Twelve Angry Men », lui-même
adapté d’une pièce de théâtre.
Les thèmes de la pièce initiale ont été habilement
transposés en un scénario qui met l’accent sur des
problèmes typiques de la société chinoise actuelle,
et en particulier les clivages
12 Citizens
sociaux. Le film a été primé au festival de Rome en octobre
2014.
2. Programmé le 29 avril, « The
Dead End » (《烈日灼心》),
est également intéressant : il s’agit du quatrième
film de
Cao Baoping (曹保平).
Il est adapté du roman « Taches solaires » (《太阳黑子》)
de la romancière Xu Yigua (须一瓜)
qui est une spécialiste du roman policier en Chine
aujourd’hui
[3] ;
partant d’une affaire de viol et de meurtre dont les
trois auteurs n’ont jamais été arrêtés, le film
revient sur leur histoire sept ans plus tard alors
qu’ils ont mené une existence tranquille en élevant
une petite orpheline.
Il est interprété par un trio d’acteurs qui ont été
couronnés tous les trois ensemble du prix
d’interprétation au festival de Shanghai où le film
était en compétition officielle en juin 2015 et qui
a décerné par ailleurs à Cao Baoping le prix du
meilleur réalisateur.