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Metteurs en scène

 
 
 
     
 

Liu Jian 刘健

Présentation

par Brigitte Duzan, 29 janvier 2013, actualisé 06 février 2017

 

En 2011, le festival du film d’animation d’Annecy a présenté, parmi les sept longs métrages en compétition, une œuvre d’un jeune réalisateur chinois qui fit aussitôt sensation : « Piercing 1 » (《刺痛我》) de Liu Jian (刘健). 

 

Né en 1969, dans le Jiangsu, Liu Jian a étudié la peinture chinoise traditionnelle à l’Institut des Beaux-Arts de Nankin dont il est sorti en 1993. Il est l’un des artistes représentatifs du mouvement post-1989 dit « Gaudy Art » (俗艺术), ou ‘gorgeously vulgar art’, et, en 1995, a commencé à s’intéresser à l’animation.

 

En 2001, il a participé au film de Feng Xiaogang (冯小刚) « Big Shot’s Funeral » (《大腕》) et, l’année suivante, au « Chicken Poets » (《像鸡毛一样飞》) de Meng Jinghui (孟京辉). En 2004, 

 

Liu Jian

il devient directeur général de la société « Nanjing Fushi Animation », participe à la production d’un film d’animation pour la télévision et, trois ans plus tard, en 2007, crée son propre studio : « Le Joy Animation Studio » (“乐无边动画”), également basé à Nankin [1].  

 

« Piercing » ou l’animation selon Liu Jian : un monde noir, très noir…

 

Piercing 1

 

C’est alors qu’il commence son premier long métrage d’animation, ce « Piercing 1 » découvert à Annecy. Liu Jian est aussi écrivain, et le scénario est basé sur l’une de ses nouvelles, écrite dix ans plus tôt. Pour financer son film, il a vendu son appartement, emprunté auprès de sa famille et réussi à rassembler au total quelque 100 000 dollars. Ses amis l’ont gentiment surnommé « l’auto-entrepreneur » (“自己投资自己”). Il a terminé son film trois ans plus tard : trois années de travail, à tout faire, la production, le scénario, le dessin et l’animation, qui pâtit de moyens financiers un peu justes et reste minimaliste ; même les voix sont celles de copains [2].

 

Mais tout est dans l’idée – un excellent scénario - et dans le dessin, où domine le noir : ce n’est ni gaudy ni gorgeous, mais c’est original. Le dessin peut sembler laid, mais la ville

est laide, nous dit Liu Jian, comme l’âme des gens qui l’habitent. La laideur semble avoir tout imprégné, et avoir gagné jusqu’aux femmes. On n’est pas chez Miyazaki.

 

Nous sommes fin 2008, dans le sud de la Chine, précise le générique initial. La crise est passée par là, beaucoup d’usines ont fermé. Le personnage principal, le jeune Zhang Xiaojun (张小军), se retrouve au chômage après tout juste un an de travail ; il se fait tabasser par un gardien de supermarché qui le prend pour un voleur, et va ensuite d’arnaque en arnaque, dans un réseau d’intrigues où

 

Atmosphère sombre

tout le monde est corrompu, des promoteurs immobiliers aux policiers. Rien de très surprenant, la littérature chinoise et la presse nous abreuvent régulièrement d’histoires de ce genre, et le cinéma nous a habitués depuis longtemps aux peintures désenchantées de la ville moderne [3]. 

 

Personnages peu avenants

 

Le film manque un peu de rythme, mais c’est voulu. On reste pris par le scénario et les dialogues, pleins d’un humour glacial, avec une touche kafkaïenne, comme il se doit. La musique est signée du musicien de rock Zuoxiao Xuzhou (左小祖咒) qui colle parfaitement avec l’atmosphère du film.

 

 

Bande annonce de « Piercing 1 » 

 

La suite

 

Le 1 du titre indique que le film ne devait pas rester seul : il était prévu que ce soit le premier d’une trilogie, la « trilogie du temps », avec un second et un troisième volets intitulés « School Town » (《大学城》) et « Mr. 19 » : même style graphique, mais coloré, et une histoire et un ton différents…

 

 

La trilogie

 

 

Liu Jian est courtisé. Il y avait à Annecy, en juin 2011, une importante délégation chinoise tout ce qu’il y a de plus officielle, venue promouvoir le cinéma d’animation chinois en Europe, pardon, l’industrie chinoise du cinéma d’animation, celle qui est pleine de couleurs et en 3D. Ces officiels gominés et cravatés ont gracieusement invité Liu Jian. Il n’est pourtant toujours pas rentré dans le système ; il s’y sentirait sans doute un peu déphasé…

 

Il a beaucoup travaillé, et à la 67ème Berlinale, en février 2017, a sorti un nouveau film différent des projets annoncés.

 

Have a Nice Day

 

Ce film est un second long métrage d’animation, « Have a Nice Day » (Hao Jile好极了), figurant parmi les films en compétition. Liu Jian a conservé le style graphique de Piercing, en y ajoutant une touche de couleur. Il a également ajouté une note d’humour grinçant et laconique au ton général du film.

 

C’est une satire féroce de la société chinoise actuelle, une

 

Have a Nice Day

comédie noire où des gens de toutes sortes se disputent un sac contenant un million de yuans. On a déjà vu ce genre de scénario, traité en fable baroque ou déjantée. Ici la fable se fait danse macabre au milieu de paysages urbains sans âme.

 

Comme pour « Piercing », les voix sont celles prêtées par des amis, dont celle de l’écrivain Cao Kou (曹寇) pour le personnage du bandit « Yeux jaunes » (“黄眼”). Il s’agit là d’un cercle d’artistes de Nankin partageant les mêmes valeurs esthétiques [4].

 


 

[1] La signification exacte du nom de son studio est « animation d’une joie sans limite » (乐无边), ce qui sonne assez ironique quand on voit son film.

[2] En fait, lorsqu’il a eu terminé son travail sur le dessin et l’animation, Liu Jian a cherché des acteurs professionnels pour les voix. Mais, après avoir dépensé une petite fortune en cachets, il y a renoncé, le résultat ne correspondant pas à ses attentes. C’est alors qu’il est allé chercher des amateurs qu’il a longuement auditionnés. Le résultat est d’un naturel qui colle parfaitement avec le style des personnages et leur donne de la profondeur.

[3] Le titre chinois刺痛我 pourrait se traduire par : ça fait mal - 刺痛  cìtòng  signifiant : infliger une douleur aiguë en piquant, perçant, poignardant, ou ressentir cette douleur (sens passif).

Interrogé sur sa signification, Liu Jian a dit :

      “至于为什么叫《刺痛我》,相信看过片子之后,就会理解其中的含义。”

  Quant à la raison pour laquelle j’ai choisi ce titre, je suis sûr que tout le monde la comprendra après avoir vu le film.

 

 

 

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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