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« Glittering Days » : la fin des hutongs vue par An
Zhanjun
par Brigitte
Duzan, 11 janvier 2013
Sorti en
2009, « Glittering Days » (《万家灯火》),
d’An
Zhanjun (安战军),
fait figure de volet conclusif
de ce
qui peut être considéré
comme une « trilogie des hutongs »,
commencée en 2004 avec « Un père à Pékin » (《看车人的七月》)
et poursuivie avec « Hutong Days » (《胡同里的阳光》) en 2007.
Retour à la
veine de « Hutong Days »…
Dans ces
deux films, An Zhanjun esquissait un tableau de la
société urbaine chinoise au début du 21ème
siècle, à travers deux comédies familiales
douces-amères situées dans les vieux hutongs
de la capitale. Le premier était une peinture pleine
de chaleur humaine de la vie quotidienne des classes
modestes de la capitale, confrontées à la difficulté
de survivre dans un monde à l’avenir incertain ; le
second était le portrait d’une classe moyenne
émergente, mais tout aussi peu assurée de ses
lendemains. |
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Glittering Days |
Références
cinématographiques et théâtrales
Mille foyers de
lumière (1948) |
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« Glittering Days » apporte une sorte de note
conclusive à ce tableau de la vie dans les vieilles
allées de la capitale, condamnées par leur vétusté à
disparaître.
Il montre
de vieilles maisons surpeuplées, où la promiscuité
provoque des conflits permanents et que la pluie
transforme en abris de fortune où l’eau s’infiltre
un peu partout par les fuites des toits. Cela
rappelle de nombreux films de Shanghai des années
1930 et 1940, et en particulier le film de 1948 de
Shen Fu (沈浮)
qui porte le même titre (chinois), connu en français
sous le titre « Dix mille foyers de lumière ».
« Glittering Days » a donc explicitement pour
référence toute une tradition de peinture urbaine au
cinéma, en Chine, qui a ses sources dans la
littérature et au théâtre, la figure tutélaire en
étant Lao She (老舍). Cette référence liminaire est d’autant plus intéressante que
« Glittering Days » est une |
adaptation
d’une pièce de théâtre éponyme, du dramaturge
populaire Li Longyun (李龙云),
pièce qui fut le grand succès du
People's Art Theatre de
Pékin en 2002.
Or
Li Longyun, né en 1905, est un dramaturge pékinois
dans la grande tradition de Lao She dont la carrière
a débuté aux lendemains de la Révolution culturelle.
Sa pièce la plus célèbre, « L’allée du petit puits »
(《小井胡同》),
en 1983, est considérée par beaucoup de critiques
littéraires comme la « suite » de « La maison de
thé » (《茶馆》)
de Lao She (1).
Petites
histoires familiales
L’histoire
de « Glittering Days » se déroule au début des
années 1990, sur quatre saisons. Elle est construite
comme un ensemble de portraits de plusieurs membres
d’une famille, la famille He (何家),
habitant un hutong surpeuplé, dans le sud de
Pékin : le quartier de Jinyuchi, ou quartier de
l’étang |
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Li Longyun |
aux poissons rouges
(金鱼池地区).
La pièce |
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Le quartier
est vétuste et doit être rasé. En attendant, la vie
continue, avec ses petits soucis quotidiens. Le fils
aîné, Laoda, veuf et chômeur, passe son temps à
faire de la calligraphie, tandis que sa fille est
harcelée par son ex-petit ami, jaloux de ses amis.
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Le deuxième
fils de la famille, Lao’er, est un vendeur de
chaussures au tempérament accommodant, constamment
houspillé par son épouse, beaucoup plus ambitieuse,
qui prépare le concours d’entrée à l’université bien
qu’enceinte jusqu’aux yeux.
Quant au
troisième et plus jeune frère, Laosan, il est
professeur, et absorbé dans l’écriture d’un livre
sur l’environnement qui lui fait délaisser son
épouse, employée |
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Le film : le hutong |
dans une maison
d’édition. Les deux ménages traversent une crise.
Lao’er et son épouse |
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Pendant
l’été, des pluies torrentielles font partiellement
effondrer la maison. Les résidents font alors
pression sur les autorités municipales pour obtenir
que toute la zone fasse l’objet d’un projet de
rénovation.
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Le scénario
fait le portrait d’une collectivité où aucun
personnage ne prend le pas sur les autres ; c’est un
portrait de groupe social emblématique. Notons
cependant le rôle un peu à part de la vieille figure
matriarcale qui refuse de bouger de l’endroit qui
l’a vu naître et où elle a ses racines, interprétée
par nulle autre que l’actrice qui interprétait un
rôle semblable dans le très beau
« Toi
et moi » (《我们俩》)
de
Ma Liwen (马俪文)
en 1905 : Jin Yaqin (金雅琴).
Mais fin
d’un monde
Comme dans
« Hutong Days », deux ans plus tôt, et avec le même
scénariste, Niu Fuzhi
(牛福智),
An Zhanjun dresse un tableau romantique et
chaleureux de la vie dans les vieux hutongs
de la capitale, mais cette fois juste au moment où
ils vont disparaître, pour céder la place à des
immeubles neufs, tout beaux tout propres, dans le
grand mouvement de démolition des années 1990.
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Le hutong et ses
fleurs |
Niu Fuzhi |
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Il y a le
même effort que dans « Hutong Days » pour donner une
coloration romantique à la vie dans ces vieilles
communautés de quartiers, mais avec, ici, un message
nouveau : la nécessité de modernisation et
rénovation urbaine. On ne peut s’empêcher de noter
au générique la présence de la municipalité de Pékin
parmi les producteurs…
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Note
(1) Sur Lao She,
voir
:
http://www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_LaoShe.htm
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