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Feng
Xiaogang annonce la sortie de « Back to 1942 » pour novembre
par Brigitte
Duzan, 21 août 2012
Alors que
débute le festival de Changchun, qui va se tenir du
20 au 25 août, mais n’offre guère de surprises, au
moins pour l’instant, une autre nouvelle suscite
beaucoup plus d’intérêt : l’annonce de la sortie
prochaine, en novembre, du nouveau film de
Feng Xiaogang (冯小刚) :
« Back to 1942 », en chinois simplement « 1942 » (《一九四二》).
C’est lors
d’une conférence de presse à Pékin, le 16 août
dernier, que Feng Xiaogang a annoncé la nouvelle,
aux côtés de son scénariste et vieux complice Liu
Zhenyun (刘霞云) (1) et de Wang Zhongjun (王中军),
directeur général de la société Huayi Brothers (华谊兄弟)
qui a coproduit le film.
Un
communiqué de presse de la Huayi,
le 15 octobre 2011, avait annoncé le début imminent
du tournage qui devait durer cinq ou six mois, avec
une sortie prévue pour la fin de l’été. Mais le film
est actuellement encore en post-production. Le
projet a pris un peu de |
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Première affiche |
retard et ce n’est
pas étonnant.
« Back
to 1942 » est présenté comme un pendant du film de Feng
Xiaogang sur le tremblement de terre de Tangshan,
« Aftershock » (《唐山大地震》),
qui a été
l’un des grands succès de l’année 2010. Le titre souligne le
désir de commémoration, soixante-dix ans plus tard, et, en
même temps, de relecture de l’histoire, comme pour
« Aftershock ».
Feng Xiaogang
présentant son film
avec son scénariste,
Liu Zhenyun |
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« Back to
1942 » est en effet un film sur une autre
catastrophe naturelle, intervenue en 1942 et
beaucoup moins connue que le tremblement de terre de
Tangshan : une famine résultant d’une sécheresse
catastrophique dans le Henan, à un moment où la
Chine était en pleine guerre contre le Japon ; la
conjonction des deux facteurs a entraîné une crise
humanitaire qui s’est soldée par près de trois
millions de morts. Mais, là aussi, la gestion de la
crise par les autorités est un point sensible.
Le scénario
comporte ainsi deux volets : l’un
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suit le parcours
des rescapés qui tentent de fuir la zone frappée par la
famine, l’autre analyse l’attitude du gouvernement du
Guomindang (le régime de Chiang Kai-chek) face à la crise et
les mesures prises pour y faire face. C’est là que la
relecture de l’histoire est délicate, et risque se traduire
par des compromissions imposées par des contraintes
politiques, comme pour
« Aftershock ».
Le film est
inspiré d’une nouvelle de Liu Zhenyun intitulée
« Memory of 1942 » (《温故1942》)
(2) que Feng Xiaogang a lue en 1993 et qu’il a eu
l’intention d’adapter depuis lors. Le délai de
réalisation du projet laisse entrevoir les
difficultés qu’ont dû rencontrer le réalisateur et
son scénariste pour faire approuver leur scénario,
et les compromis qu’ils ont dû certainement faire
pour obtenir le fiat des autorités de censure.
La bande
annonce diffusée lors de la conférence de presse du
16 août laisse |
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Feng Xiaogang avec
Wang Zhongjun |
entrevoir quelques
axes directeurs : l’étendue de la catastrophe, le désir de
Chiang
Kai-chek de la minimiser, la corruption chez les officiels
de son entourage, le tout sur fond de combats et
bombardements japonais rendant les secours difficiles…
On ne peut
s’empêcher de penser au parallèle avec la grande famine de
1962-63, consécutive, elle au Grand Bond en avant … L’une
permettant de relativiser l’autre ? La communication
officielle – ce qu’on appelait autrefois la propagande - se
révèle de plus en plus pointue, ces temps-ci, et Feng
Xiaogang en apparaît décidément comme un instrument
privilégié, même s’il lui en coûte (3).
Bande annonce 1
Bande annonce 2
Bande annonce 3
Notes
(1) L’amitié entre
les deux hommes remonte au début des années 2000 et au
succès du film « Le portable » (《手机》),
en 2003, déjà adapté d’une nouvelle de Liu Zhenyun qui est
par ailleurs un écrivain très populaire en Chine.
Voir :
http://www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_LiuZhenyun.htm
(2)
温故
wēngù
: littéralement
« réviser le passé », « revenir sur le passé », en général
pour en tirer des leçons pour le présent, comme dans
l’expression
温故知新
wēngùzhīxīn. Le programme du film est tout tracé. Reste à voir les leçons qui seront
tirées…
(3) Les pressions
que le réalisateur a dû subir sont d’ailleurs sans doute à
rapprocher de son
éclat public en septembre 2011, lors de la
Conférence nationale sur la réforme de la culture, quand il
a violemment manifesté sa colère vis-à-vis des conditions de
censure…
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