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Metteurs en scène

 
 
 
     
 

Ji Dan 季丹

Présentation

par Brigitte Duzan, 26 mars 2017, actualisé 13 décembre 2023

 

Ji Dan est une documentariste chinoise indépendante dont les films sont des portraits d’une grande sensibilité, de personnages dont elle partage un temps la vie et les difficultés, voire les drames, personnels ou familiaux.

 

De Harbin au Japon et au Tibet, et retour

 

Etudes littéraires

 

Ji Dan

  

Elle est née en 1963à à Harbin (哈尔滨), dans le Heilongjiang. En 1987, elle sort avec un diplôme de littérature de l’Université normale de Pékin et, l’année suivante, part au Japon poursuivre ses études, à l’université de Yokohama, puis l’université Seika de Kyoto.

 

Elle a ensuite travaillé à l’agence de presse japonaise Asia Press International, avant d’abandonner le journalisme et de s’orienter vers le film documentaire au début des années 1990. Elle a travaillé pour la télévision japonaise NHK, la télévision coréenne KBS, et même une chaîne de télévision taïwanaise.

 

1. Elle tourne son premier documentaire sur un sujet à cheval sur le Japon et la Chine (du nord-est) : les femmes japonaises restées en Chine, dans le Dongbei, après la fin de la guerre (《日本战后残留妇女在中国》). Puis elle part au Tibet.

 

Un an au Tibet, deux films

 

2. En 1994, elle passe un an dans le petit village de Lazi (拉孜), dans la région de Shigatse. Elle a raconté qu’elle s’était peu à peu intégrée à la vie de cette petite communauté ; elle a en particulier pris part aux réunions de personnes âgées, trois fois par mois, se familiarisant avec leur langue et leur philosophie de la vie et de la mort.

 

Elle en est revenue avec des heures de rushes dont elle a fait deux films, tous deux coréalisés avec Sha Qing (沙青) qui débutait aussi en tant que documentariste indépendant :

- le premier documentaire, « The Elders » (《老人们》), est un film sur la vie de personnes âgées dans le village et a été présenté en première mondiale au Festival du film documentaire d’Amsterdam en 1999 ;

- le second, « La vie heureuse de Gongbo » (ou « Gongbo’s Happy Life » (《贡布的幸福生活》), a été présenté en 2000 au festival international du documentaire de Taiwan, puis au festival Yunfest du Yunnan en 2003.

 

La vie heureuse de Gongbo

 

C’est le début d’une œuvre fondée sur le même principe et la même méthode, qu’elle partage avec son mari Sha Qing (沙青), et son amie Feng Yan (冯艳), rencontrée au Japon. Elles ont commencé à tourner en même temps, et, quand Ji Dan est partie au Tibet, Feng Yan est allée dans la région des Trois Gorges (三峡) où elle est restée dix ans, revenant de temps à autre au Japon faire des traductions pour financer ses recherches. Là encore, la longue durée a permis d’enregistrer les changements dans les mentalités et les réactions aux déplacements forcés dus au barrage.

 

Le temps passé ensemble

 

3. En 2000-01, Ji Dan part dans le district de Fugu (府谷县), dans le nord du Shaanxi, pour tourner « Spirit Home » ou « Nuages sur la terre »  (《地上流云》). En 2002, elle est coréalisatrice et productrice du très beau documentaire de Sha Qing « Wellspring » (《在一起的时光》), dont le titre chinois signifie « Le temps passé ensemble », qui peut s’entendre dans un double sens.

 

Spirit Home

 

L’idée initiale était de filmer un artiste spécialiste des papiers découpés ; mais, quand Sha Qing est arrivé chez lui, il s’est rendu compte qu’il avait un enfant handicapé et c’est l’enfant qui est devenu le sujet principal. Le film documente, vues de l’intérieur, les difficultés de la vie des parents, accablés par la détérioration progressive de la santé de l’enfant. Il forme en ce sens un pendant de la seconde partie de « Spiral Staircase of Harbin » de même qu’il représente le même processus de découverte progressive d’une réalité

familiale mouvante qui est le sujet même du documentaire réalisé par Ji Dan après « Spiral Staircase of Harbin » : « When the Bough Breaks » (危巢).

 

A son retour du Shaanxi, elle tourne un film sur les malades en fin de vie d’un hôpital de Pékin.

 

4. En 2007, elle a bénéficié d’une aide du Panstar Fund du festival de Busan (section Asian Network of Documentary Fund) pour un documentaire sur un sujet encore tabou en Chine, le mouvement anti- « droitiers » de 1957 et la condamnation de quelque trois millions de gens, et surtout des intellectuels, aux camps de rééducation par le travail : c’est « Dream of the Empty City » (《空城一梦》), qui s’appelait initialement « Chronique d’une ville vide » (《空城计》).

 

Dream of the Empty City

 

Le documentaire s’attache à montrer les conséquences personnelles à long terme de ces condamnations qui n’ont été levées qu’au bout de vingt-deux ans, et ce à travers deux personnages : un ancien droitier de maintenant soixante-dix ans, finalement réuni avec son fils qui avait sept ans au moment de la condamnation de son père. Le film dissèque leurs souvenirs de cette période de cauchemar absurde et leurs sentiments profonds, jusque-là inexprimés. Cela rappelle la nouvelle de Bei Dao (北岛), « Un inconnu de retour » (《归来的陌生人》) [1].

 

Harbin entre passé et présent 

 

5. C’est alors que Ji Dan revient chez, elle, à Harbin, pour voir ce que sont devenus son ancien quartier et ses habitants. Elle en fait une sorte d’élégie sur le passé, condensé dans la forme hélicoïdale d’un escalier….

 

The Spiral Staircase of Harbin

 

« The Spiral Staircase of Harbin » (《哈尔滨旋转楼梯》) est l’un des plus beaux documentaires chinois de la fin des années 2000. Elle y décrit la vie de son quartier natal et de ses anciens voisins tel qu’elle les retrouve après trente ans d’absence. Le quartier est sur une colline, dans un endroit un peu abandonné, il s’appelle dàowài (道外区), c’est-à-dire ‘le coin hors des chemins balisés’, c’est tout dire.

 

Les camarades d’enfance ont grandi, ce sont leurs enfants qui ont maintenant l’âge de la réalisatrice quand elle en était partie, pleine

d’espoir et d’illusions. Ils ne semblent pas en avoir autant…

 

Le film a obtenu le prix Asian New Currents au festival de Yamagata.

 

Vie sur les dépôts d’ordures

 

6. En 2011, Ji Dan étonne encore avec un documentaire sur une famille qui vit du recyclage des ordures en habitant directement sur une montagne de déchets : « When The Bough Breaks » (危巢) [2]. Le projet a mis longtemps à mûrir : Ji Dan a connu les deux plus jeunes filles de la famille en 2004 alors qu’elle faisait des interviews d’élèves dans une école de Pékin pour la télévision. Sur le moment, elle n’a pas vu de sujet à développer. ; les deux enfants étaient joyeuses et n’avaient pas de problème pour aller à l’école car, à l’époque, l’école ne demandait pas de frais de scolarité.

 

When the Bough Breaks

 

Ce n’est que quatre ans plus tard que le sujet a soudain surgi : les filles lui ont téléphoné pour lui dire que leur sœur aînée avait disparu. Comme elle était jolie, il était permis, et plausible, de penser au pire. La situation familiale a changé du tout au tout. Ji Dan est allée vivre à l’école des filles, pour être sur place, en pensant centrer son documentaire sur l’histoire de la grande sœur. Mais les choses ont encore évolué.

 

Parallèlement, en effet, les deux sœurs se sont battues pour que leur petit frère puisse aller à l’école, et non travailler tout de suite comme le voulait le père. C’est devenu le sujet principal. Pour cela, Ji Dan leur a donné les 2 000 yuans nécessaires.

 

Le geste a changé le rapport de la réalisatrice à son sujet ; elle franchissait la frontière entre le moi et les autres, filmés, pour substituer au regard extérieur une connivence avec son sujet, un « toi et moi » à l’opposé du détachement distancié des documentaristes masculins dans leur ensemble – à l’exception notable de Hu Jie (胡杰), dont Ji Dan est proche.

 

« When The Bough Breaks » est sorti au festival Yunfest en 2011, et a été l’un des films remarqués du festival de Rotterdam en janvier 2012.

 

Dix ans avec Baya

 

7. En 2012, Ji Dan assiste à Pékin à une conférence sur des enfants « laissés en arrière » (留守孩子), ces nombreux enfants des campagnes chinoises laissés à la garde de leurs grands-parents ou autres parents[3]. C’est à cette occasion qu’elle entend parler de Baya (芭雅), une vieille femme de l’ethnie Zhuang (壮族), et des petits-enfants qu’elle élève – Baya signifiant « grand-mère » en dialecte zhuang, ce qui prend aussi une signification symbolique.

 

Baya

 

Elle apprend ainsi que cette Baya a perdu six de ses sept enfants et qu’elle élève les orphelins qu’ils ont laissés. Elle s’est aussitôt demandé comment une femme pouvait surmonter la mort d’autant d’enfants et a décidé d’aller la voir.

 

Début 2013, elle part dans son village du district de Du’an (都安县), perdu dans les montagnes du Guangxi. Pendant le long tournage, elle a été témoin de la mort de l’aîné des petits enfants, d’une bronchopneumonie.

 

Elle traversait elle-même une période de dépression, après une rupture douloureuse. Pendant cette période, elle a aussi perdu sa propre mère. Le tournage lui a semblé comme un long tunnel, dit-elle, avec au bout la lumière, et le sentiment d’être dégagée de la peur de la mort après avoir appris à marcher dans le noir [4].

 

Le documentaire dure trois heures (237’), le temps de bien montrer la résilience dont est capable l’esprit humain, et en particulier celui d’une femme.

 


 

Filmographie

 

1993/8 Les femmes japonaises en Chine après la fin de la guerre

1999 The Elders《老人们》

2000 Gongbo’s Happy Life 《贡布的幸福生活》

2006 Spirit Home《地上流云》

2007 Dream of the Empty City《空城一梦》

2009 The Spiral Staircase of Harbin 《哈尔滨旋转楼梯》

2011 When The Bough Breaks危巢

2023 Baya《芭雅》

 

     

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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