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Huo Jianqi 霍建起

Né en 1958

Présentation

par Brigitte Duzan, 19 juin 2012

 

Huo Jianqi (霍建起est un réalisateur de la cinquième génération relativement peu connu hors de Chine, ses principales récompenses ayant été glanées dans les festivals chinois. Il est pourtant intéressant à plus d’un titre, ne serait-ce que par ses adaptations originales et pleines de sensibilité d’œuvres littéraires.

 

1982 :  Directeur artistique

 

Huo Jianqi (霍建起est né en janvier 1958 à Pékin. En 1976, il est envoyé à la campagne, mais il n’y reste pas longtemps. En 1978, il entre à l’Institut du film de Pékin, quand celui-ci rouvre ses portes après la Révolution culturelle. Huo Jianqi fait donc partie de la ‘cinquième génération’ des réalisateurs chinois, mais a fait ses classes dans le département des beaux-arts.

 

C’est le dessin qui fut en effet sa première passion, et c’est

 

Huo Jianqi

par le dessin qu’il est arrivé au cinéma, par le dessin qu’il a défini son esthétique et sa vision artistique. On retrouve très souvent dans ses films une approche picturale, dans la composition d’un paysage, d’une scène en extérieur, ou d’un portrait.

 

Diplômé en 1982, il entre comme directeur artistique au studio de Pékin. Il collabore alors, entre autres, avec Tian Zhuangzhuang (田壮壮), pour  « Septembre » (《九月》) et « Le voleur de chevaux » (《盗马贼》), sortis respectivement en 1984 et 1986, et, au tout début des années 1990, avec Xia Gang (夏钢)  pour « Unexpected Passion » (《遭遇激情》) et « After Separation »大撒把》).

 

1995 :  Réalisateur

 

The Winner

 

Ce n’est qu’en 1995 qu’il commence sa carrière de réalisateur, avec « The Winner » (《赢家》) : l’histoire d’un handicapé champion de course à pied qui se porte au secours d’une jeune fille victime d’un accident dans la rue ; il en résulte qu’elle tombe amoureuse de lui, sans se rendre compte qu’il a été amputé d’une jambe et porte une prothèse.

 

Le scénario est inspiré d’un personnage réel, Sun Zhangting (孙长亭). Né en 1966 à Tianjin, après avoir perdu sa jambe gauche dans ce que les Chinois appellent la « guerre d’autodéfense » (自卫反击战), c’est-à-dire la guerre sino-vietnamienne de 1979, il devint champion des Jeux paralympiques, et créa une société de membres artificiels en 1991.

 

Le film contient en germes deux caractéristiques essentielles du style de Huo Jianqi : à la fois romantique et résolument réaliste, en ligne avec le néo-réalisme qui se développait en littérature au même moment.

 

Il tourne son deuxième film l’année suivante : « The Singer » (歌手), sorti en 1997, histoire d’une chanteuse qui finit par s’engager dans l’Armée de libération.

 

La carrière de Huo Jianqi démarre cependant  véritablement avec le succès international que remporte son film suivant, sorti en 1999 et couronné d’un triple Coq d’or (金鸡奖) et du prix du meilleur film au festival de Montréal : « Postmen in the Mountains » (《那山,那人,那狗》).

 

1999-2002 : Une triade de succès

 

The Singer

 

1. « Postmen in the Mountains » (《那山,那人,那狗》) est une sorte de conte initiatique adapté d’une nouvelle de Peng Jianming (彭见明) qui porte le même titre chinois.

 

Postmen in the Mountains

 

Teng Rujun dans Postmen in the Mountains

 

L’histoire se déroule dans les montagnes verdoyantes du sud du Hunan. Le personnage principal est un postier qui a couru la montagne toute sa vie, d’un village isolé à un autre, pour apporter aux villageois le réconfort non tant d’une lettre épisodique que d’un contact avec le monde extérieur. Arrivé à l’âge de la retraite, il fait une dernière fois le trajet avec son fils pour l’initier au métier qu’il lui lègue, avec la mission humaine qui lui est liée.

 

C’est un film simple, tout en émotion contenue, qui a eu autant de succès en Chine même que dans les festivals étrangers. Il nous dépeint une Chine profonde, isolée et sauvage, qui rappelle celle du juge Feng. Là aussi il s’agit d’un dernier voyage, et y est associée toute la nostalgie d’un monde ancien qui disparaît peu à peu.

 

Liu Jie

 

Le succès du film doit beaucoup à l’interprétation naturelle et retenue de l’acteur principal, Teng Rujun (滕汝骏), d’ailleurs récompensé du Coq d’or du meilleur acteur pour ce rôle. Il s’est remarquer pour son interprétation de l’oncle

Luohan dans « Le sorgho rouge » (《红高粱》), de Zhang Yimou, en 1987, mais, pendant les douze années suivantes, a ensuite surtout tourné pour la télévision.

 

Quant au fils, il est interprété par Liu Jie (刘烨) : c’était son premier rôle, il avait dix-neuf ans…

 

 

Bande annonce

 

2. Le second film de Huo Jianqi, « A love of blueness » (《蓝色爱情》), sorti en 2000, est une heureuse surprise, dans un genre totalement différent. Il est adapté d’une autre nouvelle, de la romancière Fang Fang (方方), représentante du néo-réalisme en littérature, dont les œuvres sont généralement la peinture de chroniques familiales désespérées, marquées par la violence, l’échec et le malheur (1).

 

Rien de cela ici : un jeune policier, Tai Lin (邰林), se précipite pour empêcher une jeune femme, Liu Yun (刘云), de se jeter du haut d’un pont. Il ne s’agit cependant pas d’une tentative de suicide, explique la jeune fille, cela fait partie de son entraînement en ‘method acting’ ; mais elle raconte aussi qu’elle a tué son père, qui a disparu, mais aurait trempé dans un meurtre non éclairci vingt ans plus tôt… Bref, c’est un personnage complexe, plein de zones d’ombres, cette

 

A love of blueness

Liu Yun, sa mère aussi, et l’histoire devient une sorte de roman policier baroque, sur fond de réflexion sur les rapports entre l’art et la vie, et les limites entre les deux.

 

C’est filmé de main de maître : la caméra s’attache de près aux expressions des visages (caractéristique que l’on retrouvera magnifiée dans le film suivant), et dans des couleurs diffuses qui semblent faites pour préserver, ou nimber, le mystère latent ; la photo est signée Zhao Lei (赵镭), également chef opérateur de « Winner » et de « Postmen in the Mountains ». Le film a obtenu le Coq d’or du meilleur réalisateur en 2000.

 

On retrouve par ailleurs Teng Rujun dans ce film, aux côtés de Pan Yueming (潘粤明) dans le rôle du policier Tai Lin, Pan Yueming que l’on retrouve, lui, dans un rôle secondaire dans le film suivant…

 

3. Ce film, c’est « Life Show » (《生活秀》), adapté de la nouvelle éponyme de Chi Li (池莉). C’est un film où l’on

retrouve l’émotion contenue qui fait le charme de : « Postmen in the Mountains » et les gros plans sur les visages de « A Love of Blueness », un film magnifié par le travail sur la photo ; c’est un film de peintre, qui filme les détails comme un peintre fait des esquisses (2).

 

Il porte en lui, cependant, comme une fêlure intime, un germe d’imperfection qui explose dans la scène décisive qui forme l’apogée du scénario, crise paroxysmique qui tombe dans l’excès alors que tout le reste du film est marqué une grande retenue, mais qu’on oublie devant la beauté épurée de la séquence finale.

 

Cette "fêlure", cependant, va se retrouver dans les derniers films de Huo Jianqi : aucun ne vaudra les trois précédents, malgré les récompenses qu’ils pourront obtenir.

 

Après « Life Show » 

 

En 2003 sort « Nuan » (《暖》), d’après une nouvelle de Mo Yan (莫言) (3). La nouvelle est une sorte de fable, dans un style dense typique de l’auteur, avec une forte dimension symbolique qui lui donne de la profondeur, mais le film a totalement gommé cet aspect-là. Il reste de belles images, trop belles dans le cas de Nuan en particulier, on en oublie qu’elle a été théoriquement défigurée.

 

Le film a pourtant remporté, entre autres, le prix du meilleur film et du meilleur acteur au 16ème festival de Tokyo.

 

Life Show

 

Nuan

 

A Time to Love

 

Deux ans plus tard, Huo Jianqi sort un petit mélo pour la Saint-Valentin : « A Time to Love », en chinois tout simplement « La fête des amoureux » (《情人结》). Comme les films précédents, celui-ci est adapté d’une œuvre littéraire : cette fois une nouvelle d’un recueil de l’écrivain An Dun (安顿) intitulé « Les inconnus au rendez-vous » (《相约陌生人》).

 

L’histoire est celle de deux Roméo et Juliette chinois, amis d’enfance mais séparés par la haine qui oppose les deux familles, la mère du garçon accusant la famille de la fille d’être responsable du suicide de son mari. Une histoire à faire pleurer Margot, remarquablement interprétée par deux acteurs très populaires auprès du public chinois, Vicky Zhao (赵薇) et Lu Yi (陆毅), mais qui ne s’élève guère au-dessus de la romance télévisée.

 

Le film suivant, « Li Shuangliang » (《愚公移山 ), fait partie de la série de films sortis pour célébrer l’esprit national au moment des Jeux olympiques de Pékin, en 2008. C’est une sorte de conte écolo qui fait  référence à l’une des plus célèbres histoires chinoises à la base de chengyu (4) : celle du vieil homme qui réussit à force d’efforts à araser une montagne qui bloque l’accès à sa maison ; elle a donné le chengyu « Yugong déplace les montagnes » que cite le titre chinois.

 

Il s’agit ici d’un Yugong moderne : le film est la transposition passablement embellie de la vie d’un ancien ouvrier d’un groupe métallurgique de Taiyuan qui – à l'âge de sa retraite en 1983 – entreprit d'évacuer une énorme pile de déchets crachés par son usine. En 1993, il avait réussi à transformer sa folle idée en une affaire très profitable et à créer des magnifiques jardins à la place des déchets.

 

Li Shuangliang

 

On trouve l’histoire de Li Shuangliang sur le site de la compagnie Taiyuan Iron and Steel (le groupe Taigang 太钢集团公司, à Taiyuan), le « Li Shuangliang spirit » étant cité comme représentatif de l’esprit de l’entreprise : la métallurgie verte (绿色钢城) (5) ! Il est aussi devenu un modèle idéologique, et l’un des lauréats du premier prix environnemental en Chine. C’est le Lei Feng (雷锋) écolo du 21ème siècle, l’avant-garde de la Chine en lutte contre la pollution.

 

« Li Shuangliang » est tourné dans un style semi documentaire, avec, toujours, de superbes images, mais, en outre, vers la fin, l’histoire surimposée de l’épouse de Li Shuangliang, traitée en quelques flashbacks, car il faut toujours une histoire d’amour même dans les fables morales, ou surtout dans les fables morales, pour attirer le public auquel elles sont destinées.

 

Snowfall in Taipei

 

Sorti l’année suivante, en 2009, « Snowfall in Taipei » (《台北飘雪》) est l’histoire d’un jeune Taiwanais qui accueille une jeune chanteuse venue se réfugier dans la petite ville près de Taipei où il habite : elle a perdu sa voix et veut se cacher. Il lui trouve un job, la protège, l’emmène voir un médecin et évidemment tombe amoureux.

 

L’intérêt principal de cet autre mélo est qu’il s’agit de la première co-production Chine-Taiwan-Japon. Adapté d’une nouvelle japonaise, il est sorti en première mondiale au festival de Tokyo. Il est produit par la société taiwanaise Three Dots et distribué en Chine par Polybona. C’est une affaire commerciale rondement menée, pour cumuler les trois publics nationaux, avec le soutien actif des autorités de Taiwan…

 

Huo Jianqi s’affirmait ainsi de plus en plus comme l’un des

nombreux réalisateurs chinois de talent absorbés par la machine à fabriquer des mélos populaires. Au début des années 2010, cependant, il semble avoir amorcé une nouvelle étape, en passant à un autre genre très en vogue en Chine : le film historique romancé.

 

2011 : Biographies historiques romancées

 

La période privilégiée dans les deux films sortis en 2011 et 2012 est le début du vingtième siècle, période riche en personnages brisés par l’histoire, et en particulier en personnages féminins tragiques qui se prêtent à des adaptations romancées.

 

Le premier, « The Seal of Love » (《秋之白华》), sorti en 2011, est ainsi l’histoire romancée de deux personnages qui ont marqué les débuts du Parti communiste chinois : Qu Qiubai (瞿秋白 - 1899-1935) et sa seconde épouse, Yang Zhihua (杨之华 - 1900-1973). Mais le film est centré sur la seconde qui en est la narratrice.

 

Membre du mouvement étudiant radical qui suivit le 4 mai 1919, elle vint étudier à Shanghai, où elle tomba sous le charme charismatique de Qu Qiubai qui était l’un des enseignants de l’université. Elle devint la secrétaire de la section féminine de la branche shanghaïenne du Guomingdang, au moment de l’alliance avec les communistes. Puis, à la mort de la première épouse de Qu Qiubai, pendant l’été 1924, elle divorça pour se remarier avec lui, et partagea alors les dangers de son existence, au milieu des mille revirements politiques de l’époque.

 

Falling Flowers

 

Yang Zhihua est interprétée tout en finesse par l’une des actrices récurrentes des films de Huo Jianqi, Dong Jie (董洁), celle aussi qui interprète l’aveugle dans « Happy Times » (幸福时光) de Zhang Yimou. Qu Qiubai est interprété par l’acteur découvert par ce dernier pour tenir le rôle principal dans « Under the Hawthorn Tree » (《山楂树之恋》) : le sino-canadien Shawn Dou (窦骁). Il est moins convaincant que Dong Jie, et sans doute pas assez mûr pour ce rôle.

 

Mais le film est une performance visuelle, filmé par le chef opérateur de Huo Jianqi depuis « Life Show » : Sun Ming (孙明).

 

 

Bande annonce

 

Huo Jianqi avait ensuite annoncé un film sur la romancière Xiao Hong, il est sorti sous le titre anglais « Falling Flowers »《萧红》) (6). Son lancement a été officialisé par une conférence de presse à Pékin le 15 juin 2012, et il est en compétition pour la Coupe d’or au 16ème festival international de cinéma de Shanghai qui a débuté le lendemain et va se terminer le 13 juillet. Il se présente d’ores et déjà comme un retour à la veine des très beaux films tournés au tournant

 

Falling Flowers

de l’année 2000, et dans la lignée du précédent.

 

Un mot sur la scénariste Si Wu

 

La scénariste de tous ces films est Si Wu (思芜) : elle est aussi l’épouse du cinéaste, ils sont mariés depuis près de vingt ans. C’est à elle que l’on doit la touche très féminine des scénarios de Huo Jianqi, avec une tendance, cependant, à l’hyperbole (mélo)dramatique, heureusement corrigée très souvent par l’art de son mari et la superbe photo de Sun Ming.

  

Su Xiaowei

 

Ce que l’on sait moins, c’est que Si Wu est le nom de plume de Su Xiaowei (苏小卫). C’est elle qui est l’auteur, entre autres, du scénario du film de Feng Xiaogang (冯小刚) sur le tremblement de terre de Tangshan « Aftershock » (《唐山大地震》)

 

Su Xiaowei travaille au Bureau du Cinéma, au sein de l’Administration d’Etat du cinéma, de la radio et de la télévision (le SARFT) ; elle est directrice adjointe du bureau central qui traite les scénarios de cinéma : cela signifie que, deux fois par semaine, elle participe aux  sessions de travail du bureau de la censure. Quant à son travail de scénariste, il est axé principalement sur des ‘main melody films’ (主旋律”), ce qu’on appelle tendancieusement en France ‘films de propagande’.

 

Connaissant les ficelles et les arcanes des pouvoirs de censure, elle est maîtresse dans l’art du scénario qui émeut sans irriter. Personnage influent, elle est l’ombre occulte de Huo Jianqi. 

 

 

Notes

(1) Sur Fang Fang, voir : www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_FangFang.htm

(2) Voir l’analyse comparée de la nouvelle et du film : www.chinese-shortstories.com/Adaptations%20cinematographiques_ChiLi_Le_show_de_la_vie.htm

(3) Nouvelle intitulée « Le chien blanc et la balançoire » ( 《白狗秋千架》) – voir :

www.chinese-shortstories.com/Nouvelles_de_a_z_MoYan_Le_chien_blanc_et_la_balancoire.htm

(4) Chengyu : expressions figées, le plus souvent de quatre caractères, à valeur quasi adverbiale, énonçant un principe d’action fondé sur des valeurs morales fondamentales.

(5) Voir le site : www.tisco.com.cn/show.jsp?id=4041

(6) Sur Xiao Hong, voir : www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_Xiao_Hong.htm

 

                                                                              

Filmographie :

 

1995  The Winner (《赢家》)

1997  The Singer (《歌手》)

1999  Postmen in the Mountains (《那山那人那狗》)

2000  A Love of Blueness (《蓝色爱情》)

2002  Life Show  (《生活秀》)

2003  Nuan (《暖》)

2005  A time to love (《情人结》)

2008  Li Shuangliang (《愚公移山 )

2009  Snowfall in Taipei (《台北飘雪》)

2011  The Seal of Love  (《秋之白华》

2012  Falling Flowers (《萧红》)

2016  Xuanzang (《大唐玄奘》)

 

 

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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